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Coup d’œil dans le nez des éleveurs porcins

Il y a environ 600 maladies transmissibles entre humains et animaux. Connaitre de manière détaillée les liens étroits entre la santé des porcs et celle des éleveurs est nécessaire pour relever les défis de santé publique mais aussi afin de concevoir un développement durable et économique de l’industrie porcine.


Au regard de la santé respiratoire et générale, il est aussi nécessaire d’accumuler des connaissances sur l’exposition des éleveurs aux microbes présents dans l’air. C’est pourquoi l’équipe du Professeure Caroline Duchaine, experte dans l’étude des bioaérosols (contenu biologique dans l’air, les microbes par exemple), collabore depuis de nombreuses années avec les éleveurs de porcs du Québec afin de caractériser les bioaérosols dans les porcheries ainsi que l’exposition des porcs et des éleveurs à ceux-ci.

Cette équipe de l’Université Laval a comparé le contenu microbien de l’air ambiant de porcheries ou de stations de traitement des eaux usées (utilisés ici comme environnement contrôle), à celui de la flore nasopharyngée d’adultes non-fumeurs, n’ayant pas consommé d’antibiotiques récemment.

Les voies respiratoires supérieures sont constituées du nez, de la bouche et de la gorge et incluent la zone nasopharyngée. La flore (les microbes) de celle-ci est facilement prélevée avec un écouvillon (un long coton-tige). Les sujets humains de cette étude incluaient : des éleveurs porcins, des travailleurs des stations de traitement des eaux usées du Québec, et des étudiants universitaires n’ayant jamais été exposés à un environnement agricole.


L’air des stations de traitement est très chargé en bioaérosols, tout comme l’air des porcheries. Cependant, la diversité microbienne de l’air ambiant des porcheries et celle présente dans les voies respiratoires supérieures des éleveurs de porcs est bien plus riche (c.-à-d. plus diversifiée) que celle des travailleurs des stations de traitement des eaux usées. De plus, la flore microbienne de l’air des porcheries est très similaire à celle du nasopharynx des éleveurs, ce qui n’est pas le cas entre l’air des stations et les voies respiratoires supérieures de leurs travailleurs. Une exposition professionnelle et résidentielle dans les porcheries semble ainsi modifier à plus ou moins long terme la flore microbienne des voies respiratoires supérieures des éleveurs de porcs. L’échantillonnage de la flore microbienne du nasopharynx pourrait être un excellent substitut pour surveiller l’exposition des éleveurs aux microbes de l’air. La taille des particules (poussières) présentes dans l’air pourrait influencer la colonisation des voies respiratoires et expliquer l’absence de corrélation des diversités microbiennes dans les stations de traitement des eaux usées (moins de poussières) et celle positive entre la diversité microbienne du nasopharynx des éleveurs et des bioaérosols de porcheries. L’hypothèse est à vérifier en étudiant d’autres environnements riches en poussières (usines de compostage, usines de mise en sac de la tourbe).


Faits saillants pour le risque à la santé des éleveurs au regard de leur exposition professionnelle. En comparant les éleveurs de porcs aux étudiants (population urbaine en générale), les chercheurs démontrent que les éleveurs sont plus exposés à certains risques. Notamment, la flore du nasopharynx des éleveurs contient diverses bactéries possiblement pathogènes pour les humains (Staphyloccus aureus résistant à la méticilline, Clostridium difficile, Listeria) et des gènes de résistance à des antibiotiques d’importance en santé humaine (céphalosporine, colistine) et des gènes de résistance au zinc.

Dans cette étude, l’état de santé général des participants n’a pas été analysé. Il est donc impossible d’en déduire que les éleveurs sont plus malades ou plus en santé. L’hypothèse hygiéniste qui stipule que l’exposition microbienne à un jeune âge (enfant élevé sur une ferme) puisse contribuer à réduire le développement de certaines maladies à l’âge adulte (allergies) n’a aussi pas été évaluée. Les résultats révèlent toutefois que l’échantillonnage de la flore microbienne du nasopharynx est une façon simple et peu dispendieuse pour : 1) étudier et suivre l’exposition des éleveurs aux microbes de l’air, 2) pour tester l’hypothèse hygiéniste et surtout 3) identifier et surveiller des marqueurs de risque pour la santé des éleveurs.


Source : Bioaerosols Play a Major Role in the Nasopharyngeal Microbiota Content in Agricultural Environment. Hamza Mbareche, Marc Veillette, Jonathan Pilote, Valérie Létourneau and Caroline Duchaine. Int. J. Environ. Res. Public Health 2019, 16, 1375; doi:10.3390/ijerph16081375. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6518280/

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